Synthèse

Ce projet s'incrit dans un travail de réflexion autour des low-techs, de la sobriété et de l'ingénierie. Le thème retenu pour notre groupe est le dessalinisateur solaire. Le fil conducteur tout au long de l'année a été de concevoir un produit pouvant permettre de venir en aide à des populations ayant difficilement accès à l'eau en quantité suffisante. Dans un premier temps, les besoins ont été identifiés, puis le système a été modélisé puis conçu afin de répondre au mieux aux problématiques du cas d'usage. Cette expérience a été riche en apprentissages, une partie de cette synthèse sera donc consacrée à ces enseignements.

I- Identification des besoins

Aujourd'hui, des pressions s'établissent autour de l'accès à l'eau potable. Il s'agit ici de définir les frontières de cet enjeu dans le but de justifier la raison d'être du dessalinisateur solaire au sein de la société. L'eau est un besoin vital pour l'Homme, tant pour la consommation que dans la vie quotidienne : alimentation, hygiène, lavage des aliments, arrosage des plantes, abreuvage des animaux... Les inégalités autour de l'accès à cette eau augmentent à l'instar des effets du réchauffement climatique et des pollutions anthropiques : les sources s'assèchent, les eaux douces restantes sont polluées et ce sont les plus démunis, alors que ce sont les moins responsables, qui en sont les plus grandes victimes.

Les sources naturelles en eau ne suffisent plus : la nécessité de trouver des alternatives; et par dessus tout d'en trouver pour les minorités qui en souffrent.

II- Cas d'usage envisageable

Le dimensionnement et l'étude d'un projet de dessalinisation solaire low-tech nécessite la définition d'un contexte d'utilisation. En effet, les spécificités d'un dessalinisateur conditionnent sa viablilité afin de répondre aux besoins précédemment évoqués.

Après un temps de réflexion, il a été imaginé d'ancrer le système technique au sein d'un village très pauvre sur une côte et situé dans une zone exposée à un fort flux solaire.

En effet, les habitants d'un tel village n'auraient pas d'accès direct à un fournisseur d'eau potable et pourraient s'approvisionner en eau plus facilement.

Nous avons détaillé notre réflexion pour le choix du cas d'usage dans le Livrable 2

III- Dessalinisateur Watercone®

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Figure 1: Dessalinisateur Watercone®

Il n'est composé que d'un couvercle transparent et d'un réservoir de couleur noire d'un diamètre d'environ 70 cm dans lequel l'eau salée est placée. La couleur noire de ce dernier permet une meilleure absorption du rayonnement solaire à l'origine du chauffage de l'eau salée. Ce réchauffement provoque l'évaporation de l'eau qui est ainsi séparée des molécules de sel et donc adoucie. Lorsque cette vapeur atteint la paroi du couvercle, plus froide, elle se condense et glisse le long du cône jusqu'à une gouttière située à son extrémité basse. Le principal inconvénient de ce système est qu'il nécessite l'intervention d'un opérateur afin de récupérer l'eau condensée à intervalles réguliers, en renversant le contenu du couvercle dans une bouteille. Un autre point négatif est qu'il ne produit pas assez d'eau pour couvrir les besoins quotidiens d'une personne. De plus, l'eau obtenue ne peut pas être considérée comme potable (un petit peu comme l'eau de pluie) car elle ne contient pas les sels minéraux nécessaires à la consommation humaine et peut encore être polluée. Une consommation régulière d'une telle eau pourrait engendrer des carences et donc nuire à la santé du consommateur.

Dans la suite de cette synthèse, pour simplifier la modélisation et la réalisation, le dessalinisateur sera constitué d'un réservoir circulaire avec une simple feuille de plastique en guise de couvercle.

Figure 2: Schéma du dessalinisateur utilisé pour la modélisation

IV- Modélisation Watercone®

Dans le but de connaitre le rendement maximal du système envisagé, il faut réaliser une étude des transferts thermiques. Pour faciliter la compréhension et la modélisation, plusieurs hypothèses simplificatrices ont été faites ainsi qu'un schéma électrique équivalent. Ce dernier permet de décrire les transferts thermiques en faisant une analogie avec l'électricité. Les différents échanges étant modélisés par des résistances, avec des expressions physique des flux qui se ramène à une loi d’Ohm transposée aux transfert thermiques : A la place de : U=RI Les flux s’expriment comme : ϕ=(Tc-Tf)/Req Dans les transferts thermiques, les flux de chaleur décrivent la puissance énergétique échangée entre deux milieux ayant des températures différentes. Plus simplement, il s'agit de la quantité de chaleur qui traverse une surface donnée par unité de temps. Ces flux sont toujours orientés de la source la plus chaude vers la plus froide.

Les hypothèses effectuées permettent d’obtenir assez simplement un ordre de grandeur des performances du système. Le schéma thermique équivalent simplifié du Watercone® est donc le suivant :

Figure 3: Schéma équivalent du Watercone®

Les équations décrivant les échanges de ce schéma ainsi que les hypothèses simplificatrices sont regroupées dans le Livrable 3.

Ces échanges thermiques font appel aux quatre grands modes de transfert thermique que sont : la conduction, la convection, le rayonnement et le changement de phase.

La conduction est un mode de transfert thermique dans lequel la chaleur se déplace à travers un matériau solide sans qu'il y ait de mouvement macroscopique du matériau lui-même. Un exemple de conduction est la chaleur qui se déplace à travers la poêle en métal vers votre main lorsque vous touchez une poêle chaude.

La convection implique le déplacement de la chaleur par un fluide, tels que l'air ou l'eau par exemple. Cela se produit lorsque le fluide se déplace en raison d'une différence de densité ou de température, transférant ainsi la chaleur d'une région à une autre. Un exemple de convection est la circulation de l'air chaud à l'intérieur d'un four.

Le rayonnement est le transport de la chaleur par des ondes électromagnétiques, telles que la lumière. Le rayonnement ne nécessite pas de milieu pour se propager et peut se déplacer à travers le vide. Il n'est pas forcément visible. Un exemple de rayonnement est la chaleur que vous ressentez sur votre peau lorsque vous êtes exposé au soleil.

Les changements de phase sont un mode de transfert thermique qui se produit lorsqu'une substance change d'état physique, par exemple de l'eau liquide à de la vapeur ou de la glace solide à de l'eau liquide. Ces changements de phase se font, pour une pression donnée, à température constante, par exemple l’eau liquide s’évapore à 100°C à pression atmosphérique. Ce n’est pas le cas pour le Watercone®. Les changements de phase de l’eau, qui sont l’évaporation et la condensation sont un peu plus complexes.

L'exemple d'une flaque d'eau peut être pris pour comprendre. Lorsque de l'eau est présente à la surface de la Terre sous forme de flaque, les molécules d'eau sont continuellement en mouvement. Certaines molécules d'eau ont suffisamment d'énergie pour rompre les forces intermoléculaires qui les retiennent à la surface de la flaque et passer dans l'air environnant. C’est l’évaporation. L'énergie nécessaire pour rompre les forces intermoléculaires provient de la chaleur de l'environnement environnant. C'est pourquoi l'évaporation est plus rapide dans des conditions chaudes et sèches. Lorsque les molécules d'eau s'évaporent de la surface de la flaque, elles se dispersent dans l'air environnant sous forme de vapeur d'eau. La quantité de vapeur d'eau que l'air peut contenir dépend de sa température et de sa pression. Lorsque l'air est saturé de vapeur d'eau, il ne peut plus absorber d'eau supplémentaire par évaporation. Au contact d’une source froide la vapeur d'eau se refroidit, les molécules ralentissent et se rapprochent les unes des autres. Elles finissent par se rassembler en gouttelettes d'eau liquide, c’est la condensation.

Pour améliorer le Watercone®, il faut donc trouver les conditions idéales pour maximiser les phénomènes d’évaporation et de condensation mais aussi pour limiter les pertes thermiques.

Ces conditions s’obtiennent en étudiant l’influence des paramètres thermiques. Cela a permis de définir les paramètres optimaux permettant le dimensionnement du Watercone®. Les paramètres principaux sont donc :

  • Les conditions extérieures, avec le jour de l’année considéré avec une influence sur la quantité d’énergie disponible au récepteur, la vitesse du vent favorisant le refroidissement de la vapeur pour la condenser, mais aussi les températures initiales;

  • L’émissivité du récepteur, c’est-à-dire la quantité d’énergie qu’il est capable absorber par rapport à celle qu’il reçoit;

  • La taille du système, ainsi que la quantité d’eau initiale qui doit être ajustée pour maximiser la production.

Cette étude a permis d’obtenir les paramètres suivants :

Figure 4 : Paramètres optimaux

Ces paramètres permettent alors d’obtenir les chiffres suivants, avec un rendement maximal légèrment supérieur à 40 %, pour une masse d’eau produite de 45.6 Kg/ jour, soit environ 3.63 L/(jour.m²).

Néanmoins, il est important de rappeler que ces valeurs sont seulement des ordres de grandeurs obtenus en faisant de nombreuses hypothèses simplificatrices. Par exemple, la prise en considération des nuages influencerait de manière significative les résultats.

Ce modèle théorique a été validé grâce à un prototype construit à l'aide de matériaux de récupération. Cette expérience n'a pas permis de confirmer le rendement du dessalinisateur mais a permis de valider un paramètre géométrique important pour la modélisation. Il est possible de trouver plus d'informations sur l'expérience dans le Livrable 3.

V- Validation du cas d'usage du dessalinisateur

Le Watercone® ne semble pas être idéal pour lutilisation dans le cas d'usage choisi.

L'eau produite grâce au Watercone® se rapproche en effet plus d'une eau distillée, or une telle eau ne peut pas être bue régulièrement. Sa consommation sur une longue période engendrerait des carences de certains minéraux, le corps pourrait à terme se décharger en minéraux ce qui aurait des conséquences sanitaires graves.

En général, les systèmes low-tech sont très peu viables. Il y a différents moyens de dessaliniser de l'eau salée, que ce soit en utilisant des systèmes techniques low-tech ou bien high-tech. Ces derniers, comme le principe d'osmose inverse qui impose le passage de l'eau à travers une membrane, ou le principe de l'ślectrodialyse qui utilise un courant électrique pour séparer les ions constituants le sel, ne seront pas détaillés ici car ils ne peuvent pas être des concurrents à notre produit dans le cas d'usage.

Pour l'utilisation que nous souhaitons en faire, il serait préférable de concevoir un distillateur solaire ressemblant au Watercone®, ou bien de modifier le cas d'usage. Ainsi, l'usage de l'eau distillée produite grâce au distillateur pourra être plus intéressant dans un projet pédagogique au sein d'un lycée.

VI- Retour d'expérience

Ce projet a été très riche en découvertes. Nous avons développé des compétences pour rendre notre travail de recherche et de synthèse d'informations plus efficace et plus ciblé. Par exemple, le mot-clé "distillateur" propose de biens meilleurs résultats de recherches que "dessalinisateur" et permet de trouver des publications scientifiques et des articles concrets hors du domaine low-tech.

Nous avons pu nous rendre compte de la complexité d'intégrer les technologies low-techs à des cas d'usage concrets. Le dessalinisateur ne semble pas pouvoir produire des quantités utiles pour les individus, et la qualité de l'eau produite est probablement insuffisante pour être considérée comme potable. Dans notre mode de vie actuel, avec les quantités d'eau que nous consommons, il semble donc difficile d'envisager l'utilisation seule des low-techs. La low-tech est donc plus un état d'esprit à avoir: produire des sytèmes moins énergivores tout en questionnant la nécessité de notre consommation actuelle par rapport à nos besoins.